Suite à des attaques de ravageurs sur la tomate, nous étions dans les villages de Dambou Beri et Karey Gorou (Région de Tillabéri), où des agriculteurs ont demandé l’expertise du cabinet Bioengineering and Agribusiness Consulting. Il s’agit de la larve de la noctuelle de la tomate, un des plus importants insectes ravageurs de la tomate au Niger.
Sur les sites de Dambou Beri et Karey Gorou, les agriculteurs de tomate sont confrontés, chaque année, à des attaques de la noctuelle de la tomate. Cette dernière est connue pour les galeries qu’elles creusent dans les fruits, ce qui rend très difficile la lutte.
La noctuelle de la tomate est un papillon de nuit dont les larves sont des chenilles qui s’attaquent aux fruits. Connue sous le nom scientifique Helicoverpa armigera, au Niger, les agriculteurs l’appellent Maijigida ou Timati nôni, respectivement en Haoussa et en Zarma. Sur la tomate, son occurrence est beaucoup plus importante pendant la saison froide entre décembre et février.
Comment reconnaître la noctuelle de la tomate ?
A l’âge adulte, la noctuelle de la tomate est un papillon à mœurs nocturne. La larve est une chenille de couleur (verte, jaune, marron-noirâtre) et présente un épiderme lisse ou très peu velues. Après l’éclosion, la chenille s’alimente d’abord sur les jeunes bourgeons et les fleurs avant de pénétrer dans les fruits. Cela se matérialise par la présence de petits trous sur les fruits.
Quand elle entre dans le fruit, la chenille peut passer inaperçue jusqu’à la maturité. Les fruits sont rongés et troués, y laissant des galeries et des déjections brunâtres, les rendant ainsi impropres à la commercialisation. La larve préfère s’alimenter sur les fruits verts et les galeries commencent généralement à proximité du pédoncule.
Pour savoir si la larve est entrée dans le fruit il suffirait de le casser en deux et on peut y voir la chenille. Il est également possible de trouver la chrysalide, surtout dans les fruits matures.
La noctuelle de la tomate, un facteur de vulnérabilité à l’insécurité alimentaire
La noctuelle de la tomate peut aussi provoquer la maturation précoce et la chute des fruits. En creusant les trous dans les fruits attaqués, des agents phytopathogènes (comme les moisissures) pourraient se développer à cause des blessures, provoquant ainsi la pourriture des fruits. Au Niger, ce phénomène pousse les petits agriculteurs à brader leurs récoltes ce qui augmente leur vulnérabilité.
Sur quelle autre plante peut-on trouver la noctuelle de la tomate ?
La noctuelle de la tomate est un insecte très polyphage et elle peut s’alimenter sur au moins 120 espèces de plantes. Parmi ces plantes on trouve la tomate, le poivron, l’oignon et le gombo. Les dégâts sont aussi rencontrés sur des cultures comme le niébé, le soja ou le maïs.
Dans son plan de rotation ou d’association, vous devez être capables de discerner ses plantes hôtes de celles qui ne le sont pas.
Comment lutter contre la noctuelle de la tomate ?
Bonnes pratiques agricoles
La lutte contre la noctuelle de la tomate passe d’abord par le respect des bonnes pratiques agricoles. Elle consiste à :
- construire une clôture (haies vive ou morte) au tour des champs pour réduire la migration des papillons ;
- réaliser un labour profond du sol (d’environ 10 à 20 cm) ;
- identifier et détruire les mauvaises herbes hôtes de l’insecte ;
- effectuer la rotation, tous les 2 ans, avec des plantes non hôtes de l’insecte ;
- éviter d’associer (dans la même parcelle) les plantes hôtes de l’insecte telles que les solanacées ;
- respecter les écartements entre les plants au moment du repiquage pour favoriser une meilleure répartition des pesticides au moment de l’application ;
- ramasser puis détruire les fruits infestés et éviter de les jeter sur le sol ;
- détruire les résidus de culture après la campagne ;
- Harmoniser la lutte avec les champs environnants.
En respectant les consignes de bonnes pratiques, vous réduisez considérablement la pression parasitaire et cela accroît votre revenu.
La surveillance
Elle consiste à inspecter régulièrement la culture, notamment les jeunes fruits, afin de détecter les premières infestations. Une fois détecté, il est important d’arracher le fruit et d’éviter de le jeter dans le champ. La démarche consiste à :
- Enlever le fruit attaqué ;
- Le mettre dans un sachet plastique ;
- puis procéder à la destruction du fruit (par le feu, si possible) .
Lutte chimique
En cas de nécessité d’utilisation de pesticides, il est important de raisonner la protection chimique avec des produits homologués par le CSP (Comité Sahélien des Pesticides) en :
- respectant le seuil d’intervention ;
- appliquant le pesticide avant que la chenille n’entre dans le fruit, la pulvérisation devrait être réalisée au coucher du soleil ou très tôt le matin ;
- utilisant des produits contenant les matières actives suivantes : Abamectine, Chlorphyriphos (–éthyl), Cyperméthrine, Deltaméthrine, Emamectine benzoate, Indoxacarbe, Lambda-cyhalothrine.
Bonnes pratiques d’utilisation des pesticides
- Respecter le seuil d’intervention ;
- Respecter la dose et le délai entre le traitement et la récolte (2 semaines voire plus) ;
- Eviter d’utiliser des pesticides systémiques au moment de la floraison :
- à cause de la rémanence des pesticides qui peut durer plusieurs semaines et cela pourraient avoir des conséquences graves sur le consommateur.
- Pour préserver l’environnement car c’est la période où les insectes pollinisateurs comme les abeilles, visitent les cultures.
Dans les endroits où le taux d’infestation de la noctuelle est élevé, des traitements peuvent être envisagés au moment de l’éclosion des œufs (dès qu’on observe des fruits troués). A ce niveau il est important de choisir les produits contenant une matière active ayant en même temps une activité larvicide et/ou ovicide (qui tue les œufs).
Ceci est une note entrant dans le cadre des activités menées par le Cabinet Bioengineering and Agribusiness Consulting (BAC) à travers son service de clinique des plantes à l’endroit des agriculteurs nigériens.
Contacter M. Salifou Aminou au numéro +227 84 58 02 33, pour plus d’informations, notamment sur les pesticides à utiliser.
Références citées
CABI, 2019. Helicoverpa armigera (cotton bollworm). Retrieved 2019-01-30.
Cunningham J.P. & al., 1999. Learning in Helicoverpa armigera (Lepidoptera: Noctuidae): a new look at the behaviour and control of a polyphagous pest. Bulletin of Entomological Research, 89, 201–207.
Czepak C. & al., 2013. First reported occurrence of Helicoverpa armigera (Hübner) (Lepidoptera: Noctuidae) in Brazil. Research Note, Pesq. Agropec. Trop., Goiânia, (43)1, 110-113.
EFSA Panel on Plant Health, 2014. Scientific Opinion on the pest categorization of Helicoverpa armigera (Hübner). EFSA Journal, 12(10), 3833.
De Freitas Bueno A. & Sosa-Gómez, D.R., 2014. The old world bollworm in the neotropical region: The experience of brazilian growers with Helicoverpa armigera. Outlooks on Pest Management.
Sosa-Gómez D.R., & al., 2016. Timeline and geographical distribution of Helicoverpa armigera (Hübner) (Lepidoptera, Noctuidae: Heliothinae) in Brazil. Revista Brasileira de Entomologia 60, 101–104.
Comment citer l’article ?
Salifou, A. & Bachir, B.I., 2019. Gestion Intégrée de la Noctuelle de la Tomate en Milieu Paysan : Cas de deux Sites au Niger. VegNote, Vol.2 : n°1. Clinique de plante : Centre pour la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle au Niger.
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